Déclaration orale sur la portée du futur traité sur les STN

22/02/2017

Cette déclaration est présentée au nom du CETIM, membre de la Campagne mondiale pour la souveraineté des peuples, démanteler le pouvoir des transnationales et mettre fin à l’impunité.

Monsieur le modérateur, Son Excellence,

Je voudrais concentrer mon intervention sur une question essentielle qui caractérise les débats actuels autour de la portée du futur traité contraignant. La question est la suivante : le futur traité doit-il viser les STN ou être étendu à toutes les entreprises ?

Pendant la première session du Groupe de travail intergouvernemental en juillet 2015 la position d’étendre le futur traité à toutes les entreprises (locales et internationales) a été farouchement défendue, quelques soient la taille et la structure de ces entreprises. C’est une position défendue par M. Ruggie dans ses Principes directeurs. M. Ruggie est allé même plus loin dans la présentation orale de ses Principes directeurs devant le Conseil des droits de l’homme (juin 2011) en affirmant que ces derniers étaient aussi applicables aux « vendeurs de rue »… Allant dans ce sens, l’Organisation internationale des employeurs a déploré que « la juridiction extraterritoriale » ne concerne pas les entreprises locales. Elle a fait de ce point un des piliers de sa stratégie pour diluer le processus entamé à l’ONU. Pourtant, la résolution 26/9 du CoDH, qui précise le mandat, définit les « autres entreprises » comme suit : « toutes les entreprises dont les activités opérationnelles ont un caractère transnational et ne s’appliquent pas aux entreprises locales enregistrées aux termes de la législation interne pertinente. »

Cette définition nous paraît convenable, étant donné que ce sont les STN qu’il faut viser (en particulier les plus puissantes d’entre elles). En effet, avec leur pouvoir économique et politique, leur pourvoir désormais monopolistique, et leurs statuts spéciaux, les STN les plus puissantes sont capables d’échapper à tout contrôle démocratique, administratif et juridique. Ce n’est pas le cas des PME par exemple, qui font partie du tissu socio-économique d’un pays donné et qui souvent subissent les pratiques des grandes STN.

En effet, la stratégie des STN ne consiste qu’à renforcer leur position dominante sur le marché, dans pratiquement tous les secteurs de l’économie et de services par des acquisitions et fusions.

De plus, les STN sont habilitées à traîner les États devant les tribunaux d’arbitrage internationaux tel que le CIRDI. Ce n’est pas le cas des « autres entreprises ».

Je voudrais ici citer un extrait d’un rapport de l’Expert indépendant de l’ONU sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable (A/70/285), M. Alfred de Zayas, qui aujourd’hui encore a enrichi le débat en mettant en avant des éléments d’une grande importance. Je cite : « les 60% de procès perdus par les États ne laissent pas insensible, d’autant que les milliards de dollars accordés aux investisseurs sont payés par le contribuable, et c’est autant d’argent en moins pour le financement de la l’éducation, des soins de santé et des infrastructures. Selon les statistiques, environ 64% des montants alloués sont revenus à des entreprises réalisant un revenu annuel de plus de 10 milliards USD, 29% à des entreprises dont les revenus annuels se situent entre 1 milliard USD et 10 milliards USD, ou à des individus ayant un patrimoine net de plus de 100 millions USD; ainsi, les principaux bénéficiaires des transferts financiers dans le cadre des règlements des différends entre investisseurs et États, ont été les méga entreprises et les magnats extrêmement fortunés. »

À l’évidence, l’extension du mandat à toutes sortes d’entreprises n’a pas de sens, mais il s’agit d’une diversion comme tentent d’ailleurs de le justifier certains Experts en affirmant que les STN sont déjà soumises à trop de réglementation et qu’il faut désormais s’occuper des PME ! Le futur mécanisme international sur les STN serait dans ce cas impossible à mettre en œuvre, étant donné qu’il n’aura pas la capacité de surveiller des millions d’entreprises à travers le monde, qui comprennent aussi des coopératives, des exploitations paysannes familiales etc. Il s’agit donc prioritairement de soumettre à la loi des entités qui y échappent, à savoir les STN, en mettant en place un mécanisme efficace.

Je vous remercie de votre attention.

Genève, le 27 octobre 2016

Catégories Déclarations DROITS HUMAINS Sociétés transnationales
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