La contamination des bases militaires occupées par les Etats-Unis au Panama

11/11/1999

Alors que le Canal de Panama est en voie de restitution à l’Etat du Panama pour l’an 2000, selon les termes de traité de Torrijos-Carter de 1977, le problème de la pollution causée par les activités des bases militaires des Etats-Unis et de l’artillerie dangereuse laissée sur place est un sérieux obstacle aux droits du peuple panaméen.

Par la présente intervention conjointe, le Centre Europe-Tiers Monde, CETIM, et la Commission de Défense des Droits de l’Homme en Amérique Centrale, CODEHUCA, souhaitent exprimer leur préoccupation au sujet de la grave contamination de l’environnement au Panama, et transmettre à cette honorable Assemblée des informations reçues à ce sujet du Centro de Capacitación Social de Panamá. La contamination des zones occupées militairement par les Etats-Unis dans le pays, s’est faite en flagrante violation des dispositions des traités Torrijos-Carter établissant l’obligation des Etats-Unis de restituer des terres propres, sans danger pour la vie, la santé et la sécurité de la population.

C’est pour cela que nous dénonçons et communiquons notre préoccupation pour le rejet du gouvernement des Etats-Unis de remplir cet engagement en prétendant qu’il n’existe aucune méthode appropriée pour le faire, alors que nous savons que cette puissance dispose des meilleurs moyens technologiques pour réaliser cette tâche ou tout autre qui requiert des équipements sophistiqués. Mais comme ce n’est pas leur « sécurité nationale » qui est en jeu, les Etats-Unis pensent pouvoir se donner le luxe de délaisser leurs engagements et d’ignorer la contamination des terres panaméennes occupées par leur armée et actuellement en voie de restitution.

Encore récemment, on comptait près de 17.000 hectares occupés par des polygones de tir et par des bases militaires américaines. Sur ce total, 7000 hectares ont été identifiés par les autorités de l’armée des Etats-Unis comme étant des zones d’impact à haut risque. Jusqu’à présent, les autorités nord-américaines se montrent récalcitrantes à nettoyer 3175 hectares, en invoquant l’inexistence d’une méthode appropriée à cet effet.

Cette situation concerne le Centre Expérimental de Piña, situé dans les Caraïbes panaméens, Nuevo Emperador, Balboa Oeste et l’île de San José, située dans le Pacifique, à quelques kilomètres de la capitale.

Le 30 juin 1999, le Président de la République de Panama, Dr. Ernesto Pérez Balladares, a défini la position du gouvernement panaméen par la déclaration suivante : « Panama reçoit toutes les terres qui constituaient l’ancienne zone du canal, y compris celles qui sont contaminées. Néanmoins, le fait de recevoir les zones mentionnées ne signifie d’aucune manière que les Etats-Unis ont répondu aux responsabilités émanant des Traités Torrijos-Carter, à savoir : remettre les terres après les avoir débarrassées de tout danger pouvant porter atteinte à la vie, à la santé ou à la sécurité des personnes. Au contraire, en aucun cas la République de Panama ne renoncera à son droit de recevoir des zones décontaminées et sans danger pour ses habitants et elle ne relèvera pas les Etats-Unis de leurs responsabilités et de leur devoir d’indemniser les victimes d’accidents pouvant avoir lieu en raison de la contamination ».

Entre 1979 et 1996, la pollution de l’armée américaine au Panama a provoqué la mort de 21 Panaméens, victimes de munitions non désamorcées dans les secteurs occupés par l’armée américaine lors de ses entraînements. En vue de la remise de la zone du Canal, le gouvernement et le peuple panaméen exigent que soit nettoyé cet héritage mortel.

Il est nécessaire que cette problématique soit portée à la connaissance de l’opinion publique nationale et internationale de manière plus transparente. Le peuple panaméen doit être correctement informé et les autorités et organisations sociales de ce pays doivent pouvoir compter sur une solidarité internationale suffisante pour parvenir à engager le gouvernement et l’armée nord-américaine dans un processus de nettoyage complet des zones qu’elle a utilisées pour ses entraînements militaires.

Nous nous faisons l’écho des dénonciations formulées parle Fellowship of Reconsiliation, organisme non gouvernemental spécialisé dans ce domaine, qui affirme « qu’au cours de ses études menées au Panama en juillet 1997, l’expert en dépollution de sites militaires, Rick Stauber, ancien responsable du Pentagone, a dénoncé le fait que le « Comando Sur » a réalisé dans ce pays des essais avec de l’uranium appauvri et tenté par la suite de camoufler les preuves. ».

Le gouvernement des Etats-Unis est dans l’obligation d’informer dûment Panama et le monde entier de l’état écologique de chaque installation rendue afin de permettre aux Panaméens de décider à quel usage dédier ces zones.

Le peuple portoricain se trouve dans une situation comparable avec la contamination de l’Ile de Vieques, où la population a formé un bouclier humain pour empêcher les entraînements militaires qui polluent l’air et les terres de l’île portoricaine, causant par ce type d’exercices des dommages à la santé de la population et à l’environnement. En Amérique Centrale, les déchets militaires de l’armée des Etats-Unis affectent également le Honduras, dans la Base de Palmerola, région atlantique, et le Salvador, le Nicaragua et le Honduras dans le Golfe de Fonseca sur la côte pacifique.

Pour toutes ces raisons, CETIM et CODEHUCA demandent au gouvernement des Etats-Unis d’assumer ses responsabilités envers le peuple et le gouvernement de Panama relatives à la dépollution des bases militaires qu’ils occupent et de respecter ce qui a été établi dans les Traités Torrijos-Carter en rendant des terres dans de bonnes conditions de sécurité pour le développement humain.

Nous exigeons également du gouvernement nord-américain qu’il respecte la Convention sur les Armes chimiques ratifiée par les Etats-Unis et Panama.

Monsieur le Président, nous demandons que la Sous-Commission exhorte le gouvernement des Etats-Unis à honorer ses engagements internationaux et demandons, sur la base des instruments pertinents, qu’une inspection soit effectuée par des autorités internationales, entre lesquels Mme Fatma-Zohra Ksentini, rapporteur spécial sur les conséquences néfastes des mouvements et déversements illicites des produits et déchets toxiques et nocifs pour la jouissance des droits de l’homme, pour établir un diagnostique adéquat et définir les responsabilités du gouvernement des Etats-Unis envers le peuple et le gouvernement de Panama. Tous les points signalés précédemment constituent des éléments fondamentaux qui contribueront à construire les nouvelles relations entre les deux pays à l’orée du nouveau millénaire.

Catégories Cas Déclarations Droits économiques, sociaux et culturels DROITS HUMAINS Justice environnementale
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