La crise de l’insécurité en Equateur : un produit néolibéral

26/03/2024

COMMUNIQUE DE PRESSE

Quito, Genève, le 25 mars 2024 – Le CETIM[1] et UDAPT ont présenté une déclaration écrite lors de la 55e session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU concernant la détérioration alarmante des droits humains en Équateur. Ce pays, après avoir été jusqu’en 2017 l’un des pays les plus sûrs d’Amérique latine, est devenu en 2024 le pays le plus violent de la région, avec une moyenne de 40 morts violentes pour 100’000 habitant.es. Dans certaines zones, comme La Nueva Prosperina, à Guayaquil, la moyenne est de 114 morts violentes.

Le crime organisé international, qui a transféré ses opérations en Équateur, fait de ce pays le premier exportateur de drogue vers l’Europe, dépassant de loin les tonnes de cocaïne provenant du Brésil et de Colombie. D’autre part, l’Équateur est confronté, depuis 2017, à une montée brutale des politiques néolibérales visant à démanteler l’État et à privatiser tous les secteurs de l’économie. Ce qui a entraîné une augmentation de la pauvreté, du chômage, de la corruption, ainsi que le licenciement de milliers d’employé.es publics. Citons parmi d’autres conséquences une réduction des dépenses publiques ainsi que la suppression d’organismes publics et de politiques liées à la gestion de la sécurité.[2]

La stratégie néolibérale de démantèlement de l’État a également entraîné une faiblesse des contrôles dans le système financier, ce qui a permis au crime organisé de blanchir plus de 3 milliards de dollars par an. La mafia a pris le pouvoir sur certains juges, procureurs, des membres de la police, des gardiens de prison et des militaires qui protègent, facilitent ou permettent aux activités criminelles de se développer en toute impunité.

L’offensive néolibérale en Équateur se caractérise également par l’entrée en vigueur de traités de protection des investissements qui ont pour but la sauvegarde des intérêts de l’industrie extractive et de ses sociétés minières et pétrolières, au détriment des droits des communautés indigènes et paysannes.[3] A cela s’ajoute un appel à la consultation populaire pour permettre au pays d’adhérer à des instances privées d’arbitrage international, sous prétexte d’encourager les investissements étrangers. En réalité, il s’agit de porter atteinte à la souveraineté de l’Etat.

Face à cette situation, le gouvernement du président Noboa a publié une déclaration proclamant l’état d’urgence. Il a interdit les manifestations publiques et autorisé la violation de domicile ainsi que la militarisation du pays. D’autre part, il s’octroie le pouvoir d’imposer un contrôle social total. Dans le cadre de l’état d’urgence, plusieurs cas de détentions illégales, d’exécutions extrajudiciaires et de torture de détenus ont déjà été identifiés.

Ces actes violent les droits humains, en particulier les droits collectifs et les droits économiques, sociaux et culturels. Il est de plus en plus évident que, suite à l’adoption d’accords commerciaux et à l’imposition de politiques néolibérales, les sociétés transnationales gagnent en pouvoir et poursuivent en toute impunité leurs activités d’extraction qui détruisent la nature ainsi que la biodiversité et nuisent à la santé humaine. En outre, ces entités puissantes utilisent des groupes criminels pour poursuivre l’extraction des ressources naturelles, en s’appuyant sur des pratiques d’intimidation, en persécutant des dirigeant.es et utilisant la violence armée à l’encontre des communautés.

C’est pourquoi le CETIM et UDAPT appellent le gouvernement équatorien à respecter ses engagements internationaux en matière de droits humains, en particulier de droits économiques, sociaux et culturels. Les deux associations demandent également la fin du processus de démantèlement des structures étatiques ainsi que celle de privatisation des organismes et entreprises publics, un processus qui affaiblit la capacité à protéger efficacement les droits humains de la population.

 

Lire la déclaration écrite présentée au Conseil des droits de l’homme (en espagnol)
Voir la vidéo de l’intervention du CETIM à la plénière du Conseil des droits de l’homme

Contacts :

Raffaele Morgantini, représentant du CETIM auprès de l’ONU, raffaele@cetim.ch. +41796606514

Pablo Fajardo, Conselleier juridique de la UDAPT +5930993977811, pablofajardom@gmail.com

Patricio Saravia, responsable de communication de la UDAPT patriciosaraviavega@yahoo.es   +5930994220300

 

[1] Le CETIM est une organisation sociale dotée d’un statut consultatif auprès des Nations Unies.

[2] Le recul de l’Etat a eu pour conséquence le contrôle des prisons exercé de facto par des groupes criminels qui les transforment en arènes criminelles. En effet, les massacres qui ont eu lieu en milieu carcéral entre 2020 et 2023 résultent de la guerre pour le contrôle des prisons entre les cartels de la drogue (412 détenus tués lors de 11 massacres).

[3] Les habitant.es de Palo Quemado, dans le Cotopaxi, sont confronté.es aux forces de sécurité de l’État qui bafouent les droits humains des communautés opposées à l’exploitation minière et criminalisent les protestations sociales et environnementales.

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