Inadéquation de la mondialisation néo-libérale avec la réalisation du droit au développement

11/11/2003

Monsieur le Président,

Dans son “Etude préliminaire concernant l’incidence des questions économiques et financières internationales sur l’exercice des droits de l’homme” (cf. E/CN.4/2003/WG.18/2), l’expert indépendant consacre un chapitre (II) à la mondialisation et se contente de mentionner dans de rares paragraphes la politique des institutions financières internationales (FMI, Banque mondiale), de l’Organisation mondiale de commerce (OMC), la dette et l’ajustement structurel, sans situer les responsabilités. Or, ces questions font bien partie des questions économiques et financières internationales qui ont une incidence sur le droit au développement.

Dans le chapitre III du même document, l’expert parle de l’aide internationale au lieu de la mise en oeuvre de la coopération internationale. En effet, seule la coopération internationale pourrait permettre la réalisation du droit au développement, l’aide n’étant qu’un appui.

Malgré les différentes remarques, l’expert continue à définir le Droit au développement comme un processus. Il faudrait qu’il sache que le Groupe de travail n’a jamais accepté sa définition et qu’il reste fidèle à la Déclaration sur le droit au développement.

Il est surprenant que l’expert indépendant tout en affirmant qu’il est difficile d’évaluer les incidences de la mondialisation sur les pays en développement soutienne l’idée selon laquelle une ouverture accrue des marchés permet d’augmenter la croissance économique.

Force est de reconnaître l’inadéquation de la mondialisation néo-libérale actuelle avec le droit au développement et l’iniquité des accords de l’OMC pour les pays du Sud. A titre d’exemple, l’accord sur l’agriculture est profondément inique pour ces derniers, notamment les définitions du dumping et des subventions autorisées ou sujettes à réduction. Les objectifs du Doha Round d’élargir fortement cette libéralisation des échanges ne peut que dénier davantage encore aux pays du Sud leur droit au développement, car le leitmotiv de l’OMC est le libre-échange. La question qu’on doit se poser est : à qui profite ce libre échange ? Car il ne peut exister un « libre-échange », entre le pauvre et le riche, le puissant et le faible, les deux étant par définition inégaux, et ne disposant pas des mêmes moyens, ni des mêmes capacités.

Plus fondamentalement, l’expert continue à ne pas mettre en évidence une contradiction majeure : celle entre, d’une part, les diverses amputations, infligées tant par les accords de l’OMC que par divers instruments tels que les Programmes d’ajustement structurel (PAS), aux champs de souveraineté reconnus aux Etats et, d’autre part, les devoirs primordiaux qui leurs sont conférés en matière de développement. Les Etats, ceux des pays en développement notamment, ne devraient accepter aucune disposition les dépouillant des instruments de souveraineté nécessaires, voire indispensables, à l’accomplissement de leurs obligations dans le domaine du développement. Il s’agit à ce titre par exemple des dispositions restreignant leur libre détermination en matière d’investissement, d’exploitation des ressources naturelles, de marchés publics. Ils ne devraient pas non plus y être contraints, d’aucune façon, par d’autres Etats, que ce soit par le chantage, des pressions ou toute forme de “marché à prendre ou à laisser.” C’est le sens même de la coopération internationale requise pour la pleine réalisation du droit au développement, telle qu’elle est très formellement stipulée par la Déclaration sur le droit au développement.

Tenant compte de ce qui précède, il est important de se référer à la résolution 1998/72 qui demande à l’expert indépendant de faire une étude sur l’état d’avancement de la mise en oeuvre du droit au développement. L’expert aurait donc dû montrer dans quelle mesure les politiques des Etats sont allées récemment dans le sens de la reconnaissance concrète du droit au développement, indépendamment du seul aspect du taux de croissance de leur produit intérieur brut (PIB).

En conclusion, le CETIM rappelle la nécessité pour le Groupe de travail:

– d’établir une étude étendue sur les incidences des questions internationales sur l’exercice du droit au développement;

– d’étudier l’état d’avancement de la mise en oeuvre du droit au développement.

Monsieur le Président,
Je vous remercie de votre attention.

Catégories Campagnes Déclarations Droits économiques, sociaux et culturels DROITS HUMAINS
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